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Walter Chéchignac 30 & Fin par H.T.Fumiganza
Pour ceux que la littérature pétassophone actuelle débecte, un vrai roman d'homme à l'ancienne: Walter Chéchignac par H.T.Fumiganza est en vente dés à présent au prix de 11 euros port compris aux éditions L'Urbaine Des Arts / Noveling Press
Walter Chéchignac par H..Fumiganza est aussi disponible en ebook sous plusieurs formats différents ici:Lurbaine ebooks/Walter Chéchignac
ISBN 2-916006-19-2
EAN 9782916006192
30.
Re-Dimanche en famille.
Un Dimanche encore, le dernier, un dimanche beloté et paresseux, propédeutique au gigot-flageolets, déplorations sur l'époque et confiance renouvelée dans l'enfance providentielle et purificatrice.
Ils entraient dans l'hiver océanique à petits pas. Les vagues mordaient la jetée comme une jeune meute harcelant un chien de ferme.
Un Dimanche prorogé où une bourgeoisie loyale espérait après quelque restauration convenable, ou à défaut une fin du monde dans ses prix.
Sans doute la première fois où La Gaspérine ressentait ce trouble d'être le spectateur de son existence, il avait longtemps cru avec quelque prétention être de son temps et le seul capitaine de sa vie, il s'y était appliqué par la force du principe et du préjugé et il se découvrait un figurant de leur époque, un hallebardier de début de tableau, en acteur de complément.
Leur compagnon, leur confident, leur contemporain, l'ami de la famille, déjà jauni, posant en canotier, rapportant quelques nouvelles du Paris décadent, faisant admirer aux enfants sa 40 chevaux Levassor et refusant une autre prune, il avait à conduire: La Conche vers le progrès humain, son destin au mouillage et la belle Merry en leur lit conjugal.
Rien ne le réjouissait plus maintenant que ce gros lit bi-place et ventru, haut sur pattes et profond, enrubanné de lavande, de toute la naïveté de son épouse exercée. Dans leur équipage il n'était que le mécano, parfaisant les réglages de leur double-corps, Merry virtuose conduisait, les emmenait très loin les ramenait toujours.
-Je reprendrais bien un peu de prune, elle est délicieuse.
Maintenant son épouse se laissait aller, légitime et titrée, titrant de plus en plus d'ailleurs, la prune et l'air salin, forçant sur l'innocence, riant comme une jeune fille avec ces dames qui lui trouvaient maintenant des manières, une complicité d'amie d'enfance.
Les sœurs Dartemont régnaient et c'était un doux règne nombreux.
Régence bienfaisante, encensée, bénissante.
Elles avaient le temps, dix générations derrière, dix devant, long comme un train de munitions, Dartemont sœurs, indispensables au front et dans les sports d'agrément : la messe chantée, la communion sensible et la tendre plaisance de nos corps perpétuels.
Bénissantes.
La paix du soir plombait les âmes, rameutait le sentiment et sur la terrasse leurs bonshommes de la section d'artillerie fumaient, les imposants cigares bravadiens Montristécho double clemenceau distribués par le cher Walter, en admirant le tableau.
L‘océan s'était retiré, avec le tact d'un vieux serviteur de famille, et les cirés multicolores des chasseurs de crustacés perfectionnaient le motif : La Conche sur Ponche au seuil des grandes marées.
Ce fut La Gaspérine qui, abandonnant son cigare, au bord de l'écœurement, rompit le silence. Une question l'empêchait de dormir depuis quelque temps :
-Et le comptab... le ballon ! Quand même le ballon on l'a passé à profits et pertes mais enfin il a bien existé ce compta... ce... ce ballon... au moins jusqu'à ce qu'on l'assassine !
-Tssuut ! Tsssuuut ! Lui intime le chef ‘von le Gueuzec. Sans plus relever la faute de goût.
-Teeurh ! Teuurh ! Je ne vois pas de quel... ballon vous voulez parler ? Confirme Hulme de Chambeulac un peu gêné et tousseur.
Walter Chéchignac qui n'écoute pas fait celui qui n'entend pas.
La Gaspérine sans plus se soucier de l'inconvenance de ses propos insista :
-Oui, il a bien un assassin ce... ce ballon, mais plus personne ne semble s'en soucier. Tous les autres coupables sont connus sinon punis mais de celui-là tout le monde s'en fiche !
-Vous voulez parler de l'assassin du comptable cher monsieur La Gaspérine.
La voix sacrilège vient de l'intérieur, c'est celle de Belcourt, frileux et fumeur de pipe.
Infusant dans son gilet de laine, la pipe au bec assis dans son fauteuil, le cruciverbiste se dévoile pour ce qu'il est véritablement : un verbicruciste rongeur dégustant ses raisins à l'eau de vie, son plaisir dominicale, en inventant des définitions de mots croisés et le fin mot des histoires.
La Gaspérine imaginait que tous lui cachaient quelque secret volumineux sinon encombrant et que l'innocent Belcourt allait trahir sans le savoir la conspiration du silence.
Mais la vérité est plus simple et pratique, il y a seulement que tout le monde l'a oublié le décapité et a passé par pertes et profits ce reste comptable.
D'ailleurs l'annonce par Belcourt de la communication du nom du coupable ramène dans le salon les sœurs Dartemont et les fumeurs que la fraîcheur du soir et le déclin de leurs puros bravadiens renvoient au foyer de l'immeuble Dartemont-sœurs.
-Oui vous disiez monsieur Belcourt à propos de...
-L'assassin du comptable ? Mais c'est votre camarade Guillaumerde Dondla?
La Gaspérine aurait voulu sinon rire à tout le moins s'exclamer mais comme devant un danger pressant il se retrouva aphone et incapable mâme... même de sortir quelque étonnement un peu sonore.
Belcourt avait relevé la tête de ses mots croisés et regardait par dessus ses lunettes demi-lune et avec ironie le spectacle de l'effroi mutique et catatonique de La Gaspérine.
-Mais oui votre nègre monsieur La Gaspérine, petit fonctionnaire obscur des lettres et de l'administration réunies qui outre sa gnose administrative publie sous un pseudonyme sinon vendeur au moins acheteur : H.T. Fumiganza de bien mauvais romans à vocation policière et sociale, ne cherchez pas plus loin, c'est bien lui qui a fait disparaître le comptable, pour cela que l'on n'a retrouvé aucun indice.
-Mais... mais pourquoi ? Articula enfin La Gaspérine que la curiosité venait de délivrer de son mutisme et qui étrangement, on l'aura remarqué, était le seul à s'exprimer au passé.
-Mais parce qu'il le faisait chanter, il avait découvert la curieuse manie de l'auteur qui à la suite d'une correspondance plus ou moins longue choisit de venir résider quelque temps chez l'un de ses lecteurs parmi les plus fidèles, et un beau matin de le faire disparaître, le plus souvent il le décapite avec un couteau à beurre et l'on ne retrouve que la tête... et un peu de beurre.
Le pauvre comptable venait de réchapper de ses agissements coupables et il avait pris la fuite, pour quoi notre cher Hulme se fourvoyait en pensant qu'il s'agissait d'une fuite passionnelle, il n'a détourné l'argent de son entreprise que pour échapper au plus vite à cet être détestable et dangereux.
-Mais comment pouvez-vous...
-Rappelez-vous à l'hôtel qu'avez vous trouvé dans ses affaires ?
-Je ne sais plus... ah si trois romans policiers...
-Et vous les avez conservés ?
-Euh oui, je ne sais pas pourquoi, sans doute parce que je n'ai jamais pu me résoudre à jeter un livre, même mauvais, je crois que je les ai donnés au chef ‘von le Gueuzec.
-Je confirme, d'ailleurs ils sont à côté dans mon bureau, je m'étais promis de les lire à l'occasion d'une filature mais vous savez il ne m'ont pas l'air bien fameux !
-Allez les chercher, je vous prie.
Le Chef ‘von le Gueuzec, profitant de la bonne glisse des parquets encaustiqués de la veille s'élance à pleins patins sur les pistes et revient tout aussi vite munis des ouvrages en question :
-... de... Fumiganza : « Poker pénible à Bagnolet »... encore de H.T Fumiganza : l'inspecteur Gertrude et la majorette sans tête et ... toujours du même : la supérette maudite...
-Lisez ces ouvrages vous serez édifiés par toutes les ressemblances et coïncidences avec notre affaire. Et surtout comme les modes opératoires se ressemblent. Non croyez-moi nous avons à faire là à un criminel d'envergure.
-Un tueur en série ?
-Pire encore... un tueur en parallèle !
La révélation glace l'assistance d'effroi, la porte-fenêtre étant restée ouverte.
-Mais il faut faire quelque chose... prévenir la police... Articula enfin La Gaspérine, homme responsable et légaliste.
-La police toujours la police... il fait un métier difficile, il a droit à quelques distractions ç't homme-là ! Plaide avec bonté notre cher Walter.
-Bien sûr vous ne risquez rien, vous ne lisez pas ! Remarqua cette petite teigne de La Gaspérine à l'adresse de notre cher et bon Walter.
-De romans Dieu m'en préserve ! Prostitution profane comme dirait l'autre.
-Vous pensez Walter... enfin monsieur... Chéchignac qu'il est préférable de n'en rien dire.
-Il me semble oui Marie-Maude... enfin madame... Belcourt.
Même le Chef ‘von le Gueuzec paraît disposé à une certaine apathie sinon à l'indulgence :
-Personne n'aurait une aspirine ?
Quand tout soudain Madame Dartemont-Chambeulac se lève :
-Non Hulme... non revenez...
Hulme de Chambeulac ? Je n'y pensais plus à çui-ci... où qu'il est encore passé ç't corniaud-là ?
-Il va à la gendarmerie, il dit que la justice doit passer.
La justice, elle repassera... Mademoiselle Br... on fait les valoches et on se tire...
-Bien maître. (... Fin. )
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