• Walter Chéchignac 21 par H.T.Fumiganza

    21.
    Mi-temps chez les structuralistes.
    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>J'arrivais au Coin Maurin chez Dartemont sœurs, essoufflé mais sauf, au moment mâme où Valter Chéchignac faisait faire un dernier tour de fauteuil roulant aux mômes avant que de quitter les lieux :
    -Eh ben mon vieux vous vous êtes baigné tout habillé ?
     -‘eu  sais... Je sais... où il a déménagé le Pizzaiolo !
    -Il n'a pas déménagé c'est son jour de fermeture. Répondit Dartemont-Chambeulac.
    -‘ademoiselle Br... ‘lai vue... y r'tiennent votre sœur... ‘oulevard des belges.
    <o:p> </o:p>L'expédition punitive fut vite montée et nous nous retrouvâmes dans la camionnette de fonction du Chef ‘von le Gueuzec devant la maison de pécheur où j'avais été enfermé.
    -Vous êtes bien sûr ?
    -Je suis formel c'est là qu'ils m'ont emprisonné et torturé.
    -Torturé vous y allez fort mon cher, une simple prise de contact tout au plus... bon aaaaallons-y !
    Chéchignac s'était levé sur ses cannes bien décidé à commander l'assaut qui délivrerait son amour impossible.
    Il n'en fut que plus déçu de ne point la trouver au logis, ils avaient déménagé et emmené la femme d'intérieur à l'extérieur.
    -Vous vous seriez pas gouré de numéro? Hasarda le chef ‘von le Gueuzec.
    -Et ça ! Dis-je avec quelque emportement et en désignant le grand piano à queue bleu nuit.
    <o:p> </o:p>Nous retournâmes à l'agence annoncer la mauvaise nouvelle à Dartemont-Chambeulac qui était en rendez-vous avec un cocu en short :
    -... nous n'avons plus de vie de couple et elle s'absente toute la matinée de la caravane... et le soir elle revient à des onze heures avec du sable dans les cheveux.
    -Nous allons faire une enquête et...
    -Pas besoin d'enquête vous êtes au camping des palétuviers ? S'interposa le chef ‘von le Gueuzec.
    -Oui, oui les palé...
    -Elle est rousse ?
    -Ah ça oui.
    -Eh ben alors c'est le disque-jockère qui la tire votre dame ! Il a ses chaleurs en août si on l'arrête pas il va nous véroler toutes les rouquines de l'arrondissement. Je ne vous raccompagne pas vous savez ce qu'il vous reste à faire
    Non il ne voyait pas vraiment: son devoir de cocu sans doute ?
    -A l'ordinaire on met du gros grain ou de la balle à ailettes pour tirer le disque-jockére en plaine, ouais c'est ça prenez de la Brenneke spécial musicien. Insista le Chef ‘von le Gueuzec qui sur la question de l'honneur était intransigeant.
    Mais non vraiment sans façons, il n'était pas tellement partant pour le crime passionnel « the  shortman », pas plus que pour la chasse à cour, où pourtant coiffé comme il était il aurait fait bonne figure, alors il ramassa son poste de radio, son parasol et son tapis de plage et quitta la pièce, déjà résigné.
    C'est émouvant un cocu, les dames ne s'en rendent pas compte, mais souvent il y a chez eux moins de virilité blessé que d'enfance déchue.
    -Vous ne l'avez pas trouvée ? S'inquiéta Dartemont-Chambeulac ? Mon mari aussi a disparu et regardez ce que j'ai trouvé dans la boîte aux lettres.
    Valter lut à haute voix la missive :
    -Nous avons enlevé le grrrrand blanc subséquemment  et nous ne le rendrrrrons à sa famille que s'il arrête prrrrésentement ses connerrrries ...
    -Vous avez une idée monsieur Chéchignac ? Ce qui m'inquiète c'est le roulement des « r » semblables à ce que nous a raconté monsieur La Gaspérine des habitudes de ses ravisseurs.
    -Semblables en apparence mais différents dans le prononcé ceux-ci sont roulés-mouillés les autre roulés à sec, deux traditions différentes donc des origines qui ne le sont pas moins. Oui pour votre mari cela devrait s'arranger sans trop de mal s'il arrête ses conner... suspend certaines de ses activités euh... saisonnières, mais pour votre sœur il faut faire vite, avec les services on ne peut pas plaisanter, c'est l'administration, les délais courent il faut trouver leur maison de sûreté, quelque part dans la ville.
    -Moi je crois bien que je sais où qu'elle est Tata Maude !
    C'était le cher Pin-Pin.
    -Ah oui et... elle... elle va bien ?
    -Oui, oui ça peut-z-aller...
    -Et tu peux nous montrer ? Insista Valter.
    -Si les cousins veulent bien, sinon y n'ont dit qu'y me casseraient les vertéb avec un casse-noix juré si je causais... et aussi si je peux faire encore un tour en fauteuil ?
    <o:p> </o:p>Les cousins furent longs à convaincre, étrange conspiration dirigé par Louis-Hubert dit Zub qui n'avait pas dix ans mais montrait la subtilité déductive, le calme physique et l'entrain intellectuel d'un alchimiste-parachutiste de la vieille école. Ils avaient déduit de l'absence inhabituelle de leur maman d'ordinaire tellement assidue à leur bonheur que quelque chose ne tournait pas rond et en compagnie du chien du voisin qu'ils avaient dérobé nuitamment :
    -Pasque un chien ça a du flair et qu'une aventure sans chien c'est pas t'une aventure.Affirma le cousin Pin-Pin qui s'y connaissait n'en z'aventures.
    Ils étaient parvenus à découvrir ce qui nous était demeuré caché: les mauvaises habitudes du pizzaïolo, voisin trop sympathique pour être honnête. Ils s'étaient renseignés auprès de ses gamines, nullement tenues au secret défense, avaient monté moult expéditions nocturnes, exercé le chien, re-torturé les gamines, démantibulé leurs poupées, racheté des poupées, repéré les lieux, organisé les tours de garde, rapproché leurs surveillances, consigné les faits sur leur cahier de textes à spirales, approché et ravitaillé leur maman prisonnière, torturé le chien, comme ça pour voir, ramassé des crabes, torturé des crabes, s'étaient fait  mordre et avaient établi enfin un plan de campagne fort ingénieux basé sur les coefficients de marée et l'incontinence notoire de l'un des serveurs Prukhmen préposé à la garde de leur maman.
    -Si ces saligauds ont fait quelque mal à maman ils en répondront sur leur vie ! Affirma Louis-Charles dit le Preux.
    -Eh béh en tout cas on peut dire que vous au moins vous avez pas chômé ! Conclut admiratif le chef ‘von le Gueuzec.
    -Aaaallons-y ! Répéta une fois encore le cher Valter que les tours de cour en fauteuil électrifié avaient visiblement fatigué mais n'en témoignait pas moins une résolution intacte quoique nauséeuse.  
    <o:p> </o:p>Nous embarquâmes avec les Louis et le cher Pin-Pin dans la fourgonnette du Chef ‘von le Gueuzec conduite par Bédoncle le barman virtuose.
    -Vous aviez raison mon cher Valter... dit le Chef ‘von le Gueuzec.
    Il était debout à l'arrière, l'ex-garde républicain prés du fauteuil de son excellence et se cognait la tête en cadence au toit du fourgon.
    -... nous voilà en plein club des cinq !
    <o:p> </o:p>*
    <o:p> </o:p>Dans le bunker Mademoiselle Br... détricotait son écharpe interminable.
    Dans un coin Dartemont-Belcourt « gisait enchaînée » comme dans un roman de gare :
    -Comme ça au moins tu risques plus de nous emmerder, pouffiasse !
    -Vous détricotez fort bien . Remarqua adroitement Dartemont-Belcourt en se redressant.
    -Oui, j'aime bien ça depuis tout môme, je tiens ça de ma tante qui était commandant de CRS, il me racontait que quand ils étaient dans le car avant les manifestations tous ses camarades tricotaient et lui il partait le dernier, passait derrière et il leur détricotait tous leurs ouvrages et quand ils revenaient de la manif c'était la grosse déception et les grincements de chailles... c'est ça qui est bon...
    -Vous êtes taquins dans votre famille. Oui mais... mais là c'est votre propre ouvrage que vous détricotez ?
    -Ah ben ouais... c'est vrai ça...
    -Cela signifie sans doute quelque chose.
    -‘croyez ?
    -Tendances suicidaires peut-être, vous devriez consulter.
    -Tiens ‘faudra que j'en cause à mon analyste... t'es pas si conne pour une mère de famille nombreuse... je suis en analyse depuis dix-sept ans, j'en suis à mon troisième analyste, les deux précédents se sont suicidés, le troisième s'accroche mais je l'aurai. Toi aussi je t'aurai radasse, je vais te dissoudre toute vive dans de la soude caustique.
    -Caustique ce sera d'un triste !
    -Marre-toi connasse t'en as plus pour longtemps ! Avoues que t'y crois encore à l'arrivée de la cavalerie ! Mais ton Chéchignac il est plus bon à rien ! C'est p'us qu'une limace ! Une limace à roulettes ! Hierk ! Hierk !
    -Ah ouais tu crois ça fausse blonde! Retentit Walter Chéchignac dans le même temps où il la menaçait du pistolet MAB prêté par le Chef ‘von le Gueuzec...
    « Fais-y attention mon petit Valter j'y tiens c'était mon arme réglementaire du temps... » Du temps de sa splendeur républicaine, lui avait recommandé l'ex gardien du temple en la lui confiant.
    -... putain La Gaspérine je m'enfonce. Ajouta le cher Valter menaçant en perdant soudain de l'azimut et donc de l'autorité.
    De fait le sol du bunker était recouvert d'une bonne couche de sable mou et ses cannes s'enfonçaient dedans le déséquilibrant d'autant et le forçant in fine à se rasseoir lourdement sur son fauteuil.
    Je tentais de le secourir, j'avais désapprouvé son plan de campagne qui tenait en une phrase :
    -Aaaaaaaallons-y !
    Et critiqué cette offensive prématurée d'autant que la plage et les entours de l'ouvrage étaient parcourus de serveurs prukhmen, la serviette au bras mais l'arme au poing.
    Mademoiselle Br... abandonna ses loisirs structuralistes et son dé-tricot pour ramasser une pelle et elle nous jeta du sable à la figure, ce qui n'était pas de jeu.
    Le cher Valter tenta bien de faire feu mais le semi-automatique bayonnais demeura aphone, il était coincé.
    -Sa-lo-pe-rie-de-mer-de !
    Quand la tempête de sable cessa nous dûmes convenir que Mademoiselle Br... avait disparu, elle avait creusé un tunnel dans le sable  et courait sur la plage en gueulant pour rameuter la troupe :
    -Mechantski obunkeroskoï !
    Nous nous retrouvions donc assiégeants, assiégés, notre seconde vague d'assaut composée du barman Bédoncle et du chef ‘von le Gueuzec ne devant monter en ligne qu'à notre signal.
     Je regardais par l'une des ouvertures et vit les vestes blanches des serveurs s'approchant de la position.
    -Je vous avais bien dit que c'était de la folie votre truc !
    -Arrêtez vos chialeries La Gaspérine, prenez la pelle et venez me désensabler bon Dieu !
    De fait il en avait maintenant jusques aux milieu des roues  l'héroïque handicapé.
    -Et puis envoyez le signal !
    -Le signal ? Mais mon cher vous êtes parti si vite et dans un tel élan désordonné que je crains bien que nous n'ayons pris le temps de n'en convenir d'aucun.
    -Eh bien agitez votre chemise à la fenêtre, je ne sais pas moi !
    Les pizzaioli prukhmen avaient commencé de nous tirer dessus et je n'avais aucune envie de passer tout de suite au dessert en m'exposant inutilement.
    -Si personne ne fait rien ils vont nous faire aux pattes aussi bien qu'en 40 ! Insista Chéchignac.  
    -Je n'ai pas souvenir d'une participation prukhmen à nos déboires de l'an 40.
    -Oh arrêtez ça mon vieux ! Dit-il en passant la marche arrière et en faisant ronfler ses moteurs asynchrones.
    Miracle il parvint à se désensabler.
    -Eh bien nous avons maintenant une division motorisée à disposition ? Continuais-je de grincer.
    -Vous ne croyez pas si bien dire mon vieux, je vais te leur faire une percée moi ! Gueula-t-il en passant le seuil du bunker à vive allure.
    -Non Walter je vous en prie ! S'écria Dartemont-Belcourt toujours enchaînée.
    Ce cri avait retenti comme un aveu... si j'ose dire.
    -C'est beau, c'est grand c'est généreux, c'est français... mais il va s'ensabler comme un couillon dans les dunes ! Commentai-je depuis l'une des meurtrières d'où je contemplais le champs de bataille sous la lune.
    A mon grand étonnement sa percée réussit et mit le plus grand désordre dans les lignes ennemies, il est vrai qu'elle était puissamment soutenue par Bédoncle le barman de La Bégude qui courait sur ses talons en puisant dans sa musette et en balançant force grenades def' à destination des troupes Prukhmen qui rembarquèrent dans leurs camionnettes de livraison  plus piteusement encore que les britiches à Dunkerque.
    -Attendez-moiski bande d'enculoskoï ! Gueulait en courant à leur suite la terrible Mademoiselle Br...
    <o:p> </o:p>*
    <o:p> </o:p>Une heure après nous abandonnions à notre tour le champs de bataille où nous venions de triompher, malheureusement la camionnette du Chef ‘von le Gueuzec ayant refusé de démarrer malgré les encouragements des mômes qui faisaient un tintouin du Diable à l'arrière, ce fut le cher Valter qui nous prit en remorque avec son fauteuil roulant préparation spéciale, sur ses genoux Dartemont-Belcourt dormait, Walter Chéchignac, la moustache dans ses cheveux, souriait, les larmes tombaient de derrière ses lunettes noires comme d'une source nocturne, je crois que c'était là le plus heureux moment de sa vie.
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