• Vacances actives !
    1/1 par H.T.Fumiganza
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      L'autre jour nous regardions les offres de destination vacances sur EasyCattle.com avec Pervenche rien ne nous tentait vraiment, on avait déjà tout fait : le Bengladéche en ski nautique, le Yémen en parapente furtif aussi bien que l'Afghanistan en  char T.92 hybride. Le plus important dans les vacances pour nous, et pour tout le monde aujourd'hui, je crois, c'est les activités, c'est vrai quoi sinon on s'ennuie tout de suite en vacances, comment s'occuper ?

    J'ai abandonné un instant l'écran pour descendre les poubelles et l'enfant, on lui a pas encore donné de nom, on l'a fait il y a trois ans quand on parlait des bébés médicaments, le concept nous a tout de suite plu, on s'était dit avec Pervenche que ce serait peut-être pas bête d'en faire un pour les piéces détachées et un pour la route, on a commencé par la remonte et puis finalement on en est resté là, on le gardera peut-être même si on prend un chien plutôt qu'un enfant.

      Josy qui tient l'agence de voyages Emergency Tour sur la place Lolo Ferrari (18°) où nous habitons était en train de fermer, je lui ai demandé des nouvelles de Jacky son époux, un merveilleux tour opérator avec lequel j'ai fait dans le temps pendant un congé-maladie les sept plus grands sommets de l'Hymalaya en patins à roulettes (nous étions jeunes, le plus physique c'est la descente !) et qui est actuellement détenu  comme otage remplaçant  par les FARC (et attrapes) en Colombie septentrionale où il était allé reconnaître de possibles parcours de trek :

    -Jacky ? Oui j'ai eu de ses nouvelles par Internet, il devrait passer otage titulaire au Printemps, si tout va bien.

    -Ah chouette.

    -Il dit que c'est dur d'avoir de l'avancement, ils sont tellement nombreux là-bas, et puis tu sais comment ça marche ? Comme partout il y a les pistonnés, les pipeules qui passent avant tout le monde. Tu prends un café, j'allais fermer, on a le temps.

    Nous avons un peu discuté, je lui ai dit notre embarras, nous avions regroupé nos RTT pour pouvoir partir trois semaines avec Pervenche, en laissant le môme en consîgne (mais non pas à la Gare de Lyon ! Dans un parking à bébémédicament, un établissement très bien, très propre, très moderne où on leur fait les niveaux tous les jours.). Je suis sous-directeur-Adjoint du Centre d'Information, d'Orientation et de Documentation sur l'Autosexualité et les Altersexualités  (Cinfodaa.) de la Ville de Paris  (Numéro vert 0 800 000 001 ) où Pervenche est archiviste, c'est pas un travail facile avec toutes ces pages collées, aussi avions-nous bien besoin de vacances, mais pas des vacances genre Flôts bleus, non des vacances, modernes actives .

    -Et pourquoi pas le Prukhménistan !

    -On connaît, on l'a fait il y a cinq ans quand on s'est pacsés.

    Nous étions allés à Prukhmout-City avec Pervenche peu de temps après notre rencontre elle revenait d' un stage de Inch Climbing au Tibet et moi d'un parcours de réoxygénation spirituelle et mentale dans une lamasserie autant dire qu'on avait les chaussures encore fumantes et tout de suite sexuellement on s'est trouvé, cela va faire cinq ans le mois prochain, à l'époque la destination était peu connue, nous en gardions un souvenir délicieux, c'était le printemps et les champs de betteraves étaient en fleur.

    -Il parait que ça a bien changé depuis, j'ai un séjour SocialWaves de trois semaines...

    -SocialWaves c'est what ?

    -C'est un nouveau concept de vacances actives et equitabeule trade que l'Office de Tourisme Prukhméne a développé. ils sont très réactifs, très compétitifs tu sais, il y a plein d'activités dirigées et vous traversez tout le pays en raquettes de tennis ! Le côté athlétique je sais que ça compte pour toi.

    -Ouais, pourquoi pas.

    -Et puis c'est un pays merveilleux, la population est tellement accueillante... et en ce moment c'est pour rien, en hôtel international **** avec vue sur la mer, il me reste deux places et pas en low costs sur la compagnie nationale: Prukhmen Airways.

    A la vérité ce n'était pas un charter mais nous voyageâmes en Worker Class, c'est-à-dire qu'à l'arrivée, nous avons perdu une bonne heure à vider et ranger les plateaux-repas, passer l'aspirateur et repasser les rideaux.

    Quant à l'hôtel à nom de matelas : The Imperial Confort  il donnait certes sur les plages mais il était niché entre les hauts-fourneaux et l'usine d'incinération d'ordures ménagères.

    De fait Prukhmout-City avait pris un développement étonnant, ce n'était plus la petite capitale provinciale entourée d'immenses champs de betteraves et ses marchés à tout le moins bigarrés et parcourue d'innombrables Tire-Tire (l'ancêtre du pousse-pousse mais pratiqué à l'inverse de la croyance la plus répandue dans le reste de l'Asie et dans lequel le conducteur moteur vous fait face et vous prévient des dangers qu'il ne peut éviter et qu'il vous faut alors prendre à votre compte, une manière de brouette kamikazée si l'on veut!) que nous avions connue, mais une métropole incalculable, ressemée en buildings babéliens, ponts suspendus, bretelles et ceintures autoroutières. Ils venaient d'ailleurs d'inaugurer leur neuvième périphérique souterrain. Incroyable le trafic et donc la pollution, à côté Paris ressemblait à une sous-préfecture de garnison.

    C'était un mouvement incroyable, les prukhménes ont toujours été d'énergiques travailleurs mais là ils se surpassaient, tout le monde courrait en regardant la montre du voisin et en lui marchant sur les pompes.

    Quand nous sommes sortis de l'hôtel après avoir défait nos bagages, passé une tenue d'expédition urbaine et mis nos raquettes de tennis aux pieds, nous avons interrogé  notre guide-interprète:

    -Tire-Tire ?

    -No more trop métier de con ! Nous a-t-il expliqué sans que nous comprenions tout ce qu'il expliquait, il avait fait français seizième langue au lycée et tout en se foutant de notre gueule à cause des raquettes.  

     Plus de Tire-Tire, c'était dommage car cela participait pour une bonne part du pittoresque des lieux.

    -Louer un vélo est-ce possible ? Avons-nous demandé bien décidés à lâcher nos raquettes au profit d'un moyen de transport moderne et éthique.

    -Ding-ding. Biçaïkeule in Prukhmout-City, you die in few minutes.

    Bon nous décidâmes d'aller sur la plage, cette plage où nous nous étions aimés avec Pervenche à de multiples et satisfaisantes reprises.

    Les plages brillaient au soleil... pourtant faiblard de ce début d'après-midi :

    -Ferro-nickels bioutifoule !

    Ces imbéciles avaient répandu sur les plages de sable porphyroïde les scories de ferro-nickel venant de l'usine sidérurgiques voisine.

    On s'était mis pieds nus avec Pervenche et forcément on s'est blessé les pieds et on a remis nos raquettes soudain une musique a retenti, diffusée tout le long de la plage, et tous ceux qui s'y trouvaient se sont raidis instantanément :

    -Casquettes ! Enlevez casquettes pendant hymne saligoo ! Nous a intimé notre guide.

    C'est devenu assez vite lassant cette histoire d'hymne et de saligoo. Il retentissait toutes les heures et même les touristes étaient tenus de se mettre au garde à vous pendant l'exécution.

    Sans nous en rendre compte à la suite de notre guide, nous nous sommes retrouvés dans une banlieue de Prukhmout-City devant l'entrée d'une usine immense qui fabriquait de tout en très grandes séries: International Prukhmen Company of Engineering and Industrials for Equitabeule Trade Corporation ça s'appelait. Notre guide a absolument tenu à nous faire visiter, c'était immense, ils fabriquaient de tout: des réveils aussi bien que des presses purées électroniques, des extincteurs ou des fours à pain, des brouettes et des pompes à main et même des ouvriers pour leurs propres chaînes: il entrait des paysans et elle vous sortait des travailleurs parfaitement calibrés.

    Le guide nous a désigné deux places en milieu de chaîne, il voulait absolument qu'on essaye, il y avait plus de trois milles ouvriers dans l'immense halle, nous nous y sommes mis avec Pervenche, un contremaître est venu a regardé notre travail et nous a dit en le jetant dans une corbeille en plastique:

    -Not good ! Frenchies bad ! Belgians good !

     Et en même temps il nous désignait un couple très appliqué sur la ligne de production devant nous.

    -Brigitte et Jean-Luc Van Der Berk ! Se sont-il aussitôt présentés sans quitter leur travail. Nous sommes de Liége, vous aussi vous vous êtes fait avoir avec le séjour actif SocialWaves de ces salauds de l'Office de Tourisme Prukhméne. Quand je pense qu'on pourrait être bien tranquilles en pull marin sur une plage ventée de chez nous à ne rien faire que de combattre le vent et de faire des mots fléchés en écoutant le transistor!

    Nous avions le droit de revenir le soir à l'hôtel à pied sans supplément mais c'était loin (19 Kms !) et les taxis sont chers là-bas, et puis on était fatigués, les cadences étaient très élevées, ils montaient un scooter en 3‘27‘' il faut suivre, surtout quand on a pas l'habitude de travailler, alors avec les Flohic' de Perros-Guirec, les Martin-Besnard de Livry-Gargan et les Van Der Berk de Liége le soir nous restions couchés au dortoir 116W et nous prenions nos repas dans la grande salle commune 23 B. Et puis comme ça on se faisait des souvenirs en même temps que l'on avait un vrai contact avec la population... bâillante et somnolente. Avant de monter on allait s'en fumer une, j'avais recommencé, je sais c'est mal mais ça détend aussi quand on est crevé comme ça, devant le grand dégueuloir du collecteur central des égouts de Prukhmout-City, on en profitait pour écrire des cartes postales avec plein de couchers de soleil aux amis restés à Paris:

    -Gros bisous de Prukhmout-City !

    L'écriture était un peu tremblée, à cause des cadences de la journée. On nous avait changé de chaînes on était au rechapage des brouettes. C'était intéressant.

    On a traversé tout le Prukhménistan comme ça en raquettes de tennis au gré de nos différentes affectations, d'activités dirigées en activités obligées on a fini dans une taule sordide, un bob pour mineurs au plus profond du pays profond. Pervenche se faisait jusqu'à 50 passes par nuit, moi pas plus d'une vingtaine, je suis très étroit (enfin beaucoup moins maintenant.).

    On comptait les jours jusqu'à notre départ et le moment où on pourrait retrouver le boulot à Paris  pour enfin se reposer... et peut-être même s'asseoir.

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    Au retour, après avoir retiré l'enfant  de la consigne (en l'accrochant sur le vélib, je me suis rendu compte d'ailleurs qu'il m'avaient donné le N° 5468 alors que j'avais le ticket N° 5467, mais je n'avais aucune envie de refaire la queue pour réclamer, et puis à un chiffre prés, ça ne valait vraiment pas le coup d'y retourner!) je suis allé voir Josy pour lui faire un scandale, vrai j'étais indigné, au moins très colère, enfin assez remonté :

    -Ouais je sais c'est limite arnaque comme plan mais tu voulais des activités t'en as eu !

    -Ah ça c'est sûr.

    -C'était éthique ? T'as exploité personne ?

    -Ce sont eux qui nous ont exploités. Tu te rends compte qu'on a payé pour travailler à la chaîne... et je te raconte pas tout...

    -Forcément t'avais jamais travaillé de tes mains...

    -Oh s'il n'y avait eu que ça...

    -Ouais... ça t'a fait une expérience humaine. Et puis qu'est-ce que tu veux, la com' est bonne, je suis bien obligé d'en placer un max pour payer la rançon de ce connard de Jacky !

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